L’attrait croissant des fumeurs pour l’hypnose dans le sevrage tabagique
De plus en plus de fumeurs se tournent vers l’hypnose pour tenter de se libérer de leur dépendance au tabac. Mais cette technique est-elle vraiment efficace ? Nous avons échangé avec le Pr Daniel Thomas, cardiologue et représentant de la Société francophone de tabacologie, ainsi que le Dr Dominique Triviaux, spécialiste en addictologie au Centre Léon Bérard de Lyon et formé à l’hypnose.
En France, le nombre de fumeurs quotidiens s’élève à près de 12 millions. D’après les données de Santé publique France, 59,3 % des Français expriment le désir d’arrêter de fumer, 26,4 % envisagent de le faire dans les six prochains mois et 30,3 % ont tenté une cessation d’au moins une semaine au cours de l’année écoulée. « Le tabac demeure la principale cause de mortalité évitable dans notre pays, causant 75 000 décès en 2015, soit 13 % des décès », souligne l’organisme.
Face à plusieurs méthodes scientifiquement prouvées et remboursées pour arrêter de fumer, certains choisissent des alternatives comme l’auriculothérapie au laser ou l’hypnose.
L’hypnose est-elle une solution efficace pour cesser de fumer ?
L’efficacité de l’hypnose médicale dans l’arrêt du tabac n’est pas encore prouvée.
Efficacité non prouvée par elle-même
L’hypnose n’est toujours pas reconnue ni recommandée comme méthode de sevrage tabagique. À ce jour, il n’existe pas de preuves permettant d’affirmer que l’hypnose est plus efficace que d’autres supports comportementaux ou que l’arrêt sans aucune aide.
Pr Daniel Thomas
cardiologue
Un rapport de l’Inserm confirme que l’hypnothérapie n’a pas montré d’efficacité supérieure à d’autres interventions ou à l’absence de traitement sur les taux de sevrage à six mois. Les bénéfices de l’hypnothérapie sur l’arrêt du tabac mis en avant par des études non contrôlées n’ont pas été validés par des essais contrôlés randomisés.
Un complément potentiellement bénéfique
Si l’hypnose n’a pas été prouvée comme méthode efficace pour le sevrage tabagique, elle peut trouver son utilité en complément, en aidant à gérer les envies liées au stress et à consolider l’arrêt du tabac sur le long terme. « Nous sommes davantage dans une approche d’hypnose médicale, utilisée pour le contrôle de l’anxiété et des facteurs déclenchant le besoin de fumer, plutôt qu’une méthode de sevrage à elle seule », explique le Dr Dominique Triviaux. « Chez certains patients, l’hypnose aide à mieux gérer le stress et l’anxiété qui provoquent les envies de fumer et permet de surmonter le cap de la « dernière cigarette » ou de diminuer un craving intense. Cependant, la technique, surtout pour le craving, est complexe à appliquer seul en dehors des séances. À mon avis, l’hypnose doit être envisagée en complément d’autres traitements validés, notamment la substitution nicotinique ».
Combien de séances d’hypnose sont nécessaires pour arrêter de fumer ?
Il n’existe pas de recommandation officielle ni de protocole standard pour le nombre de séances d’hypnose nécessaires à l’arrêt du tabagisme, car l’hypnose n’est pas approuvée par la Haute Autorité de Santé (HAS) ni par Santé publique France pour cette utilisation.
Les fumeurs doivent se méfier des promesses de résultats « miraculeux » ou des tarifs excessifs.
Pr Daniel Thomas
cardiologue
Quel est le prix d’une séance d’hypnose pour arrêter de fumer ?
Le coût d’une séance d’hypnose pour arrêter de fumer varie significativement en fonction du praticien, de la région, de la durée et du protocole suivi. Certains hypnothérapeutes proposent des tarifs allant jusqu’à 150 ou 200 euros pour une seule séance. « Les traitements médicaux de substitution nicotinique sont remboursés par l’Assurance-Maladie, ce qui n’est pas le cas de l’hypnose, sauf si elle est pratiquée par un médecin tabacologue dans le cadre d’un traitement de sevrage tabagique », rappelle le Pr Thomas.
Sevrage tabagique : quelles sont les méthodes scientifiquement validées pour arrêter la cigarette ?
Contrairement à l’hypnose, dont l’efficacité reste à prouver, plusieurs méthodes ont été scientifiquement validées et sont recommandées par la Haute Autorité de Santé (HAS) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour vaincre l’addiction au tabac. Parmi ces méthodes :
- La substitution nicotinique, qui gère efficacement la dépendance à la nicotine à l’aide de traitements médicamenteux symptomatiques, tels que les patchs transdermiques et les gommes à mâcher.
- Des médicaments comme la varénicline (Champix®), qui agit sur les récepteurs nicotiniques, réduisant ainsi le plaisir lié au tabac et les symptômes de manque.
- Les thérapies comportementales et cognitives (TCC), qui aident à identifier et modifier les comportements déclencheurs de l’envie de fumer.
Avec ces méthodes validées et un suivi adapté par des médecins spécialisés, le taux de sevrage atteint environ 50 % après un an.