Il est peu fréquent de rencontrer quelqu’un qui n’a jamais subi les désagréments d’une soirée où l’alcool était de trop, entraînant des nausées et parfois des vomissements. Mais pourquoi cela se produit-il ? Est-ce une bonne idée de provoquer des vomissements après avoir bu excessivement ? Quels sont les autres risques liés à la consommation d’alcool ? Voici les éclaircissements apportés par la Dre Christelle Peybernard, psychiatre addictologue et auteure de l’ouvrage Mieux se protéger de la dépendance à l’alcool publié chez Dunod.
Conséquences de l’intoxication alcoolique : que se produit-il lorsque l’organisme est saturé d’alcool ?
L’alcool est une substance toxique pour le corps humain, et sa consommation entraîne une élimination progressive par le foie, mais également par les reins, la peau, les poumons et la salive. « Cependant, notre système enzymatique n’est pas conçu pour éliminer rapidement de grandes quantités d’alcool », souligne la Dre Peybernard.
Il faut généralement de une heure et demie à deux heures pour éliminer une unité d’alcool
En pratique, chaque unité d’alcool (un verre de vin, une bière, un verre de champagne, un shot de whisky) augmente notre alcoolémie de 0,2 g par litre de sang.
« En moyenne, l’organisme humain élimine entre 0,1 et 0,15 g d’alcool par litre de sang par heure, ce qui signifie qu’il lui faut en moyenne entre une heure et demie et deux heures pour éliminer un verre », explique l’experte.
Quand la quantité d’alcool ingérée en peu de temps est trop élevée, les capacités d’élimination de notre corps sont rapidement dépassées.
Les vomissements sont une des manières dont notre corps tente de se débarrasser de l’excès d’alcool. Dre Christelle Peybernard, psychiatre addictologue et auteure.
L’alcool est également une substance très irritante pour les parois gastriques, ce qui peut également encourager les nausées et les vomissements.
La tolérance à l’alcool varie grandement d’une personne à l’autre
Il est important de noter que la tolérance à l’alcool varie selon les individus et est souvent liée à la corpulence, ce qui explique pourquoi en général, les hommes supportent mieux l’alcool que les femmes.
Plus une personne est grande et musclée, mieux elle tolère l’alcool. Cependant, une bonne tolérance ne signifie pas que l’alcool est moins dangereux. Au contraire, elle peut encourager une consommation excessive, augmentant ainsi les risques. Dre Peybernard.
Élimination de l’alcool : est-il conseillé de provoquer des vomissements en cas d’excès ?
Il peut sembler tentant de se faire vomir si l’on ressent qu’on a bu un verre de trop, mais c’est une mauvaise idée. « D’une part, l’alcool ingéré passe rapidement dans le sang, ce qui signifie que les vomissements n’auront qu’un effet limité sur l’élimination de l’alcool. D’autre part, en cas de consommation importante d’alcool, le système nerveux autonome est moins réactif, ce qui augmente le risque d’inhalation accidentelle », précise l’experte.
Cela s’ajoute aux effets néfastes du reflux de l’alcool dans l’œsophage et la bouche : inflammation de l’œsophage, des gencives et détérioration de l’émail dentaire. Provoquer volontairement des vomissements est donc totalement déconseillé en cas de consommation excessive d’alcool !
Combien de temps les vomissements peuvent-ils durer après avoir consommé de l’alcool ?
La sensibilité aux vomissements suite à un excès d’alcool varie beaucoup selon les personnes et les circonstances. Elle dépend de divers facteurs tels que la quantité d’alcool consommée, la quantité de nourriture ingérée, la tolérance individuelle à l’alcool et la sensibilité de l’estomac. Certaines personnes ne vomiront pas même après avoir consommé plus de cinq verres, tandis que d’autres se sentiront malades pendant plusieurs heures avec moins d’alcool.
Comment mettre fin aux vomissements après une intoxication alcoolique ?
Malheureusement, il n’existe pas de solution miracle pour stopper les vomissements après une intoxication alcoolique.
Il est déconseillé de consommer de grandes quantités d’eau, car cela peut augmenter les vomissements et aggraver les pertes de sels minéraux. Je recommande de se réhydrater en buvant très lentement, par petites gorgées, et en privilégiant des boissons sucrées ou des bouillons salés contenant des électrolytes. Les solutions de réhydratation sont aussi une bonne option. Dre Peybernard.
En cas de vomissements sévères et d’alcoolémie élevée, il est conseillé de contacter immédiatement les services d’urgence en composant le 15 ou le 112.
Risques liés à la consommation d’alcool pour la santé
L’alcool est responsable de 49 000 décès chaque année en France. Ses effets néfastes, bien connus, peuvent être immédiats ou se manifester à long terme.
À court terme, l’alcool entraîne une perte d’inhibition, une réduction des réflexes et de la vigilance, ainsi qu’une diminution du champ visuel. Cela augmente significativement les risques d’accidents et d’agressions : accidents de la route, chutes, bagarres, violences, impulsivité, noyades, rapports sexuels non consentis, et même des agressions sexuelles », détaille l’addictologue.
À long terme, une consommation excessive et régulière d’alcool accroît les risques de cancers.
L’alcool est classifié comme cancérogène de niveau 1. Il est reconnu comme facteur de risque pour sept types de cancers : bouche, gorge, larynx, œsophage, colorectal, foie et sein. Dre Peybernard.
La consommation chronique d’alcool a aussi des effets néfastes sur le foie (cirrhose, hépatites), sur le système cardiovasculaire, ainsi que sur la santé mentale et psychique (dépression, anxiété).
L’alcool est également très addictif. L’alcoolisme représente l’une des addictions les plus fréquentes et les plus mortelles en France.
L’addiction à l’alcool peut avoir de graves répercussions sociales et familiales : échec scolaire, perte d’emploi, ruptures conjugales, violences conjugales ou familiales, isolement… « Lorsqu’une personne est confrontée à une addiction à l’alcool, les conséquences affectent toute la famille, en particulier les enfants », ajoute Dre Peybernard.
Quels sont les effets de l’alcool sur le cerveau ?
Une fois ingéré, l’alcool passe dans le sang et affecte directement le cerveau. « Il agit comme un dépresseur du système nerveux central, ralentissant ainsi l’activité cérébrale », explique la Dre Peybernard.
À court terme, il provoque des troubles de l’attention, de la coordination et de l’élocution. Il déséquilibre également le circuit de la récompense en modifiant la sécrétion de dopamine, de GABA et de glutamate, ce qui est à l’origine de l’accoutumance et de la dépendance.
« À long terme, il empêche la bonne absorption de la vitamine B1, essentielle à l’activité cérébrale, et affecte les zones de l’hippocampe (qui gère la mémoire) et du cervelet (équilibre) : ce qui favorise l’apparition de troubles mnésiques et de la coordination », ajoute la spécialiste.