Le corps humain : une mécanique de précision
Quand la chaleur s’intensifie, nous avons souvent l’impression de bouillir. Nous transpirons, nous avons du mal à respirer et nous recherchons désespérément un peu de fraîcheur. Mais est-ce que notre température corporelle s’élève réellement sous l’effet de la chaleur ? Et surtout, est-ce préoccupant ?
Vous pourriez être surpris, mais normalement, la température du corps ne devrait pas augmenter même pendant une vague de chaleur. Si cela se produit, c’est le signe d’un problème potentiel. Julie Chastang, médecin généraliste et vice-présidente du Collège de la Médecine Générale, nous explique pourquoi.
Le corps humain est une machine bien réglée
Notre corps est incroyablement bien adapté pour gérer les variations de température. Même lorsqu’il fait extrêmement chaud dehors, notre température interne reste étonnamment constante. Comment ? Grâce à notre système de thermorégulation extrêmement efficace. « Notre corps fait tout son possible pour éviter la surchauffe. La transpiration aide à libérer la chaleur : lorsque la sueur s’évapore, elle rafraîchit la peau. La vasodilatation permet aux vaisseaux sanguins de se dilater vers la surface de la peau pour libérer la chaleur. En même temps, notre corps diminue naturellement notre activité physique pour réduire la production interne de chaleur », détaille le Dr Chastang.
Imaginez que vous êtes sur une plage ensoleillée, sans parasol. Vous transpirez abondamment et ressentez la montée de la chaleur. Mais tant que vous continuez à boire de l’eau régulièrement et à prendre des pauses à l’ombre, votre corps maintient sa température stable. Vous avez chaud, certes, mais vous n’avez pas de fièvre. Si tout fonctionne correctement, notre température corporelle ne devrait pas excéder 38°C, même lors d’un épisode de forte chaleur. Si c’est le cas, cela pourrait indiquer un coup de chaleur, une condition grave due à un échec de la thermorégulation.
Si votre température dépasse 38°C, prudence !
Une légère augmentation de la température peut survenir après un effort physique ou une longue exposition au soleil, surtout si vous n’êtes pas suffisamment hydraté. Cependant, cela devrait rapidement redescendre. Par contre, si votre température dépasse 38°C et reste élevée, cela n’est pas normal, prévient le Dr Julie Chastang. Et si le thermomètre atteint 39 ou 40°C, ce n’est plus juste un coup de chaud : c’est un coup de chaleur, une urgence médicale immédiate.
« Dans ce cas, le corps ne parvient plus à se refroidir. La température interne continue d’augmenter, les mécanismes de régulation comme la transpiration cessent de fonctionner, et cela peut devenir potentiellement mortel. La personne affectée peut être confuse, somnolente, avoir des difficultés à parler, voire perdre connaissance. C’est une urgence vitale », insiste la médecin.
Les signes qui doivent alerter :
- Fatigue soudaine, grande faiblesse,
- Maux de tête, nausées,
- Sensation de vertige ou de confusion,
- Peau très chaude et sèche (absence de transpiration),
- Comportement inhabituel : somnolence, agitation, propos incohérents…
Dans ce cas, il faut agir vite :
- Appeler le 15 ou le 112,
- Mettre la personne à l’ombre ou dans un endroit frais,
- La déshabiller partiellement,
- L’asperger d’eau tempérée (pas froide) et l’éventer,
- Ne pas attendre que « ça passe tout seul ».
Qui sont les plus à risque de surchauffe corporelle ?
La plupart des gens supportent bien la chaleur, à condition de s’hydrater régulièrement et de se reposer. Cependant, certaines personnes sont plus vulnérables :
- Les personnes âgées, surtout celles de plus de 75 ans. Leur système de thermorégulation est moins efficace, elles transpirent moins et ressentent moins la soif, explique le Dr Chastang.
- Les nourrissons et les jeunes enfants. Leur corps ne sait pas encore bien réguler la température corporelle.
- Les personnes avec des troubles cognitifs (comme la maladie d’Alzheimer, la démence…) ou en perte d’autonomie, qui peuvent oublier de boire ou de se mettre au frais.
- Les personnes atteintes de maladies neurologiques (comme la maladie de Parkinson ou la sclérose en plaques), ou de maladies chroniques (diabète, insuffisance cardiaque…).
- Celles sous certains médicaments affectant la régulation thermique, comme les diurétiques, les neuroleptiques, les antidépresseurs ou les bêtabloquants.
- Les travailleurs exposés à la chaleur ou les sportifs durant un effort intense, surtout s’ils ne s’hydratent pas correctement.
Que faire pour les protéger ?
- Les encourager à boire fréquemment, même s’ils n’ont pas soif.
- Les placer dans un endroit frais, à l’abri du soleil.
- Rafraîchir leur peau avec un linge humide, un brumisateur ou une douche tiède.
- Les surveiller de près durant les périodes de canicule.
Les bons gestes pour aider votre corps à garder la tête froide
Même en bonne santé, ces gestes simples peuvent soulager la sensation de chaleur et permettre à votre corps de mieux fonctionner :
- Buvez régulièrement, par petites gorgées, même sans soif.
- Mangez léger, privilégiez les fruits et légumes riches en eau.
- Fermez les volets durant la journée, aérez tôt le matin ou pendant la nuit.
- Portez des vêtements amples, en coton ou en lin, de couleur claire.
- Évitez les efforts physiques aux heures les plus chaudes, entre 11 h et 17 h. Si vous devez sortir, préférez le faire tôt le matin ou en soirée.
- Prenez des douches tièdes, pas glacées : l’eau froide peut choquer le corps et avoir un effet contraire. Utilisez un linge humide sur la nuque ou le front, ou un brumisateur.
En conclusion, il est tout à fait normal de transpirer et de se sentir fatigué quand il fait très chaud. Mais si votre température corporelle augmente significativement, c’est un signal d’alarme. Si vous vous sentez « bizarre », que vous ne transpirez plus, ou que vous avez des vertiges, demandez de l’aide sans tarder. « Surtout, prenez soin de vous… et des autres. Un simple geste (comme rendre visite à un voisin âgé ou offrir un verre d’eau) peut sauver une vie », insiste le Dr Chastang.
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